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Rachid Brahim-Djelloul est professeur de violon oriental au conservatoire

Cet entretien révèle un musicien brillant aux multiples talents : violoniste, musicologue, directeur artistique de l’Ensemble Amedyez… Tout d’abord, violoniste de formation classique, Rachid Brahim-Djelloul est arrivé au violon oriental bien plus tard. Un musicien « entre deux rives » dont le parcours est riche de rencontres et de collaborations.

publié le samedi 14 février 2015

Ses débuts, premiers souvenirs musicaux et parcours :

Rachid Brahim-Djelloul a grandi au sein d’une famille très mélomane. Dans les années 20, son grand-père jouait du tuba dans une fanfare. Aîné d’une fratrie de quatre enfants ayant tous fait de la musique, Rachid et sa sœur Amel (chanteuse lyrique) sont les seuls à y consacrer leurs vies.
Son père aimait le violon et souhaitait que son fils apprenne à jouer de cet instrument. A l’âge de 9 ans, Rachid Brahim-Djelloul débute son apprentissage au conservatoire d’Alger dans la classe du professeur russe Taoufik Aslanov. Dès ses débuts, Rachid Brahim-Djelloul manifeste de grandes prédispositions pour la musique et le violon. Il a eu la chance de bénéficier de cours particuliers avec son professeur qui lui permirent de développer ses talents. Depuis son plus jeune âge, Rachid Brahim-Djelloul a toujours chanté. Cela lui a été d’une grande aide dans l’apprentissage de l‘instrument mélodique qu‘est le violon. A la maison, son père écoutait beaucoup de chanson française : Charles Aznavour, Jean Ferrat…
Vers 12 ans, un déclic se produit. Son amour pour la musique devient une évidence. Désormais, il ne travaille plus son violon par obligation, mais par plaisir.
Au lycée, il poursuit un cursus classique et manifeste toujours son plaisir à jouer du violon que ce soit en orchestre ou en formation de chambre. Après l’obtention de son Bac, Rachid Brahim-Djelloul souhaitait se consacrer pleinement au violon et poursuivre ses études musicales en Russie. Mais, ses parents, le trouvant trop jeune pour partir aussi loin, refusèrent. Ils acceptèrent tout de même que Rachid Brahim-Djelloul se professionnalise dans la musique. Il obtient rapidement ses Prix de violon et de musique de chambre et achève son cursus musical au conservatoire. A l’âge de 20 ans, il est nommé professeur de violon au conservatoire d’Alger !
Il décide de poursuivre en parallèle des études universitaires. Mais au lieu de suivre des études d’architecture, il s’inscrit en musicologie dont le département vient d’ouvrir. Il obtient une Licence ainsi qu’une Licence d’enseignement.
En 1988, Rachid Brahim-Djelloul vient en France. Sa venue n’était initialement pas prévue et est le fruit d’un heureux hasard. Le pianiste français Pascal Nemirowski donnait un concert à Alger. A sa demande, Rachid Brahim-Djelloul a joué en seconde partie de la représentation. A l’issue de leur prestation, le pianiste lui propose de venir se perfectionner en France durant une année. C’est ainsi que Rachid Brahim-Djelloul entre au conservatoire de Rueil-Malmaison dans la classe du violoniste Gilles Henry. Il décroche un 1er Prix de violon et un 1er Prix de musique de chambre.
En 1989, il s’inscrit en thèse à l’Université de Paris VIII en tant qu’élève boursier. Auparavant, il avait déjà obtenu une Maîtrise sur le sujet « Instruments de l’orchestre de l’Ecole d’Alger », puis un DEA « Etude comparative entre les rythmes de l’Ecole d’Alger et celle de Tlemcen » dont le directeur de mémoire était Ivanka Stoïanova. Ces deux mémoires ont amorcé son immense intérêt et sa passion à l’égard de la musique traditionnelle.
Au même moment, une association arabo-andalouse algérienne voit le jour à laquelle Rachid Brahim-Djelloul adhère. Il interrompt temporairement sa thèse qui demeure actuellement toujours entre parenthèses. Dès lors, il mène une activité musicale très prolifique et diversifiée.
Durant cette période, il se produit beaucoup en duo avec la pianiste Sonia Mecheri, puis pendant 7 ans, en tant que second violon au sein du Quatuor à cordes Hypoténuse. Il pratique alors la musique traditionnelle en parallèle de la musique classique.
En 1994, Rachid Brahim-Djelloul travaille aux côtés de la chanteuse Emmanuelle Drouet sur une pièce de Slimane Benaïssa « Prophètes sans dieu » qui tournera pendant 6 ans. Leur intérêt commun pour les musiques judéo-espagnoles lui permet de commencer à trouver sa voie. Ses musiques se situent en effet à la croisée des musiques traditionnelles méditerranéennes et européennes. Son concept devient de plus en plus évident. Il s’agit de trouver un moyen d’adapter sa double culture afin de la mettre au service de « ces » musiques. Mais comment utiliser ses acquis pour apporter quelque chose de nouveau, de personnel en plus ? C’est-ce à quoi il s’efforce de répondre jusqu’à présent.
A la fin des années 90 et jusqu’à la moitié des années 2000, Rachid Brahim-Djelloul crée un quatuor spécialisé dans les musiques de variétés orientales aux sonorités traditionnelles. Il travaille notamment avec le chanteur Enrico Macias.
Il a un véritable coup de foudre pour la musique ottomane et ses dérivés à la suite de la découverte d’un disque du violoniste turc Nedim Nalbantoglu qu’il avait précédemment rencontré en 1988 dans l’Orchestre de la Méditerranée. Ce disque est une véritable révélation. Mélangeant jazz et musique traditionnelle, Nedim Nalbantoglu donne un autre visage au violon. Littéralement sous le charme, Rachid Brahim-Djelloul acquiert de nombreux disques de musique turque, bulgare…
Il participe également à de nombreux enregistrements avec des artistes arabo-andalous (Sandra Bessis, Nassima…), mais aussi à des concerts de musique classique.
Sa sœur, Amel Brahim-Djelloul le sollicite pour réaliser un disque autour des chants et des musiques de la Méditerranée. Il construit le programme de cet album qui met en évidence tous les liens du bassin méditerranéen. Paru en 2008, ce disque est l’aboutissement pour Rachid Brahim-Djelloul d’un travail mené sur 10 ans. Ses recherches l’ont, entre autre, amené à s’interroger sur la possibilité de réussir à transcrire et à transmettre une musique de tradition orale à des musiciens avant tout « lecteurs ». Son travail allie très étroitement l’oral à l’écrit.

A l’origine, Rachid Brahim-Djelloul était venu à Gennevilliers uniquement pour renforcer l’Orchestre du conservatoire lors d’ un concert de « La Traviata » de Verdi. Pendant la pause, il joue du traditionnel dans les coulisses. Bernard Cavanna l’entend et emballé lui propose aussitôt de venir enseigner le violon oriental à l’ENM de Gennevilliers. Il lui offre une sorte de « Carte blanche » hors des circuits standards. C’est à cette occasion que la classe de violon oriental voit le jour. Elle compte aujourd’hui une dizaine d’élèves.
En filigrane, l’ouvrage toujours sur le métier, Rachid Brahim-Djelloul poursuit ses travaux de recherches et continue de glaner des matériaux et des éléments au sujet de sa thèse « Analyse comparative entre les modes arabo-andalous et les modes grégoriens ». Tout un programme qu’il nous sera sans doute possible de découvrir d’ici quelques années sous la plume du « Dr » Rachid Brahim-Djelloul.
En attendant, le futur et nouvel équipement de l’ENM de Gennevilliers devrait proposer un nouveau département consacré à la musique orientale qui dispensera des cours de chant, de oud, de cordes, de percussions…
Autre nouveauté, depuis maintenant un an, Rachid Brahim-Djelloul dirige, tous les vendredis, en compagnie de Yousef Zayed (oud, percussions) une chorale de chants méditerranéens qui compte une vingtaine de participants.

Son idée de la pédagogie ?

Sa classe de violon oriental s’adresse à des élèves ayant déjà une pratique du violon.
L’idée est de toujours travailler sur des choses que les élèves vont apprécier et qui vont les stimuler, les encourager à jouer. Son enseignement tient compte de la progression de chacun et s’adapte aux différentes personnalités. Rachid Brahim-Djelloul travaille sur une musique de tradition orale, ce qui comprend certaines contraintes. Dans un premier temps, il dégrossit le canevas avec l’élève, c’est-à-dire les notes, le mode, le rythme. Puis, il s’intéresse plus précisément à l’ornementation et l’articulation de la pièce. L’interprétation permet ensuite beaucoup d’improvisation.
Chaque élève bénéficie d’un cour individuel, mais Rachid Brahim-Djelloul met l’accent sur l’importance de « jouer ensemble ». Jouer devant un public, mais aussi partager une scène avec des professionnels est primordial pour avancer. Ceux qui ont un petit niveau sont ainsi tirés vers le haut.
Sa méthode consiste à transmettre et organiser au sein du groupe dont il fait partie intégrante. Il est le « cadre », le lien entre toutes les personnes qui le compose.
Pour lui, « L’oral sert l’écrit et l’écrit sert l’oral ». D’un côté son enseignement aide les musiciens « lecteurs » à se détacher de la partition. De l’autre, il aide ceux qui ne savent pas lire à apprendre à regarder une partition. Il fait donc la charnière entre deux pratiques.
Son objectif est de parvenir à créer une pédagogie, une méthode spécifique sur ces musiques de tradition méditerranéenne, issues de plusieurs pays, ayant chacune dans leur enseignement des particularités propres. Une pédagogie entrain de se faire dans laquelle Rachid Brahim-Djelloul fait figure de précurseur !

Voici les œuvres, compositeurs et artistes de références qui ont marqué Rachid Brahim-Djelloul :
J.S. Bach et la musique romantique en général. La musique turque : le compositeur et joueur de qanûn Göksel Baktagir, Nedim Nalbantoglu, le Trio Taksim. Le violoniste David Oïstrakh, le pianiste Sviatoslav Richter, le Quatuor Borodine, le Quatuor Talich…

Ses « coups de cœur » du moment (musique, livre, cinéma…)

Rachid Brahim-Djelloul avoue avoir du mal à lire des romans car il rêve déjà suffisamment avec la musique.

Côté littérature : « Le commencement d’un monde » de Jean-Claude Guillebaud.

Côté cinéma : « Gett, le procès de Viviane Amsalem » de Shlomi et Ronit Elkabetz, « Winter sleep » de Nuri Bilge Ceylan.

Côté musique : « Al Bint El Chalabiya » de Nedim Nalbantoglu

Actualités et évènements à ne pas manquer :

Vendredi 20 mars à 20h : Concert « Poètes et poétesses Al-Andalus : musiques et mélismes » avec Amel et Rachid Brahim-Djelloul et l‘Ensemble Amedyez à l’Espace Aimé-Césaire de Gennevilliers.

Depuis le 14 janvier 2015, la Philharmonie de Paris a ouvert ses portes. N’hésitez pas à vous y rendre afin de découvrir et d’apprécier la belle acoustique de la nouvelle salle de la Philharmonie 2.

http://www.philharmoniedeparis.fr/fr/la-grande-salle-une-prouesse-acoustique

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